Après avoir passé la nuit à essayer vainement de dormir à cause d’un nez bouché, je croyais trouver chez mon pharmacien la solution pour retrouver le sommeil. Malheureusement, il ne peut plus délivrer un médicament à base de pseudoéphédrine pour « un nez à déboucher » sauf avec une ordonnance, voici pourquoi.
La pseudoéphédrine et ses effets
La pseudoéphédrine comme l’éphédrine sont extraites de la tige et des feuilles d’un petit buisson du genre Ephedra, d’où leurs noms.
Leurs actions thérapeutiques sont connues depuis l’antiquité et mentionnées dans les plus anciens ouvrages de médecine chinoise, grecque, romaine ou indienne.
L’éphédrine et la pseudoéphédrine ont été synthétisées dans les années 1920.
L’éphédrine et la pseudoéphédrine agissent sur les muscles des vaisseaux en entraîinant une diminution de leur diamètre ou vasoconstriction.
Lors d’un rhume, les fosses nasales sont congestionnées et donnent la sensation de nez bouché sous l’effet d’une vasodilatation nécessaire à la lutte contre une infection ou à la suite d’une réaction allergique locale. La pseudoéphédrine en exerçant son effet vasoconstricteur soulage la congestion et la sensation de nez bouché.
L’usage de la pseudoéphédrine est-il dangereux ?
Aucun médicament n’est sans risque. Pour ce qui concerne la pseudoéphédrine dans les traitements oraux du « rhume » le risque d’infarctus du myocarde ou d’accident vasculaire cérébral était connu et des mesures ont été prises avec dans un premier temps : l’interdiction de la publicité (2017), puis la mise à disposition par l’ANSM d’une information écrite à destination des professionnels et des patients (2020). En 2023 les autorités européennes ont été alertées par la survenue de nouveaux troubles neurologiques graves et préoccupants (syndrome d’encéphalopathie postérieure réversible et de syndrome de vasoconstriction cérébrale réversible) chez des patients sans facteur de risque ni antécédent médical, et cela, quelles que soient la dose et la durée du traitement. Même si le risque peut apparaître en première intention très faible, il n’en est pas moins important surtout pour les personnes qui l’ont subi, simplement pour avoir voulu éviter la sensation de nez bouché.
La notion du rapport bénéfices-risques
L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) et la Haute autorité de santé (HAS) définissent sur les éléments du dossier de demande de commercialisation (Autorisation de mise sur le marché) et/ou les effets indésirables (études cliniques et pharmacovigilance) qui leur sont rapportés l’utilité thérapeutique et les risques d’effets indésirables d’un médicament avant et après sa commercialisation.
Les médicaments oraux du « rhume » ont été considérés comme ayant un intérêt thérapeutique insuffisant pour bénéficier d’un remboursement par l’Assurance maladie. La fréquence et l’ancienneté de leurs usages les autorisaient jusqu’à présent à être conseillés pour un usage limité à 5 jours par un pharmacien. Le risque étant considéré dans ces conditions comme faible pour un bénéfice bien que de confort resté dès lors favorable. La prise en compte plus marquée des risques neurologiques par l’ANSM a accru le risque par rapport au bénéfice. Ce qui a entraîné l’obligation de prescription.
Ce que certains pourront considérer comme un excès de prudence n’est que la prise en compte par l’ANSM des retours de plus en plus documentés de la pharmacovigilance au niveau européen (PRAC) et en autres des demandes réitérées des associations de patients et de consommateurs concernant les médicaments contenant de la pseudoéphédrine.
Des mesures simples et sans risque pour traiter un rhume
Tout en affirmant que « le rhume guérit spontanément en 7 à 10 jours sans médicaments » l’ANSM donne les conseils suivants :
• Humidifier l’intérieur du nez avec des solutions de lavage adaptées : sérum physiologique, sprays d’eau thermale ou d’eau de mer…
• Boire suffisamment
• Dormir la tête surélevée
• Maintenir une atmosphère fraîche (18-20 °C) et aérer régulièrement les pièces
• Appliquer les gestes barrières :
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Lavage des mains
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Utilisation de mouchoirs à usage unique
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Port d’un masque jetable
Références :
O. Laccourreyea,c,∗, A. Werner b, J.-P. Giroudc, V. Couloigner d, P. Bonfils a,
E. Bondon-Guittone Benefits, limits and danger of ephedrine and pseudoephedrine as
nasal decongestants - European Annals of Otorhinolaryngology, Head and Neck diseases 132 (2015) 31–34
PRAC recommends measures to minimise the risk of serious side effects with medicines containing pseudoephedrine - 01 December 2023 EMA/535476/2023
Médicaments contre le rhume Officiellement déconseillés mais vendus sans précaution — article sur le site Que Choisir publié 07 mars 2024
Information destinée aux médecins généralistes, allergologues, ORL, neurologues, urgentistes, pneumologues et pharmaciens. ANSM avril 2024
Décision du 09/12/2024 portant radiation et inscription sur les listes I et II des substances vénéneuses définies à l’article L.5132-6 du code de la santé publique — site de l’ANSM article publié 10/12/2024
Dr Jean Michel Mrozovski